Encadrement :
Résumé Sujet en Français :
Cadre général
Les sols ont une importance cruciale pour les régulations climatiques. En effet, ils contiennent trois fois plus de C que l’atmosphère (2400 GtC vs 800 GtC), sous forme de C organique présent dans les matières organiques (MO). Des modifications positives ou négatives du stock de C organique du sol peuvent impacter la concentration en CO2 atmosphérique, sur des pas de temps de l’ordre de la décennie[1]. Les sols peuvent se comporter comme un puits ou une source de C, en fonction de leurs propriétés, du climat, de l’usage des terres... Dans ce contexte, l’initiative "4 pour 1 000 pour la sécurité alimentaire et le climat" (http://4p1000.org/), vise à fédérer au niveau mondial les acteurs étatiques et non étatiques qui souhaitent s’impliquer dans une meilleure gestion des stocks de C des sols. L’objectif est d’augmenter globalement ces stocks dans les zones agricoles (cultures, prairies, forêts), avec des effets positifs attendus à la fois sur la sécurité alimentaire et sur le changement climatique [2]. Une augmentation des teneurs en MO des sols est en effet également bénéfique pour la fertilité des sols.
Cependant, la faisabilité de séquestrer des grandes quantités de C dans les sols a été remise en cause pour des raisons stœchiométriques [3]. En effet, au niveau mondial, les sols de surface ont un rapport C:N assez constant d’environ 12 [4]. Le maintien de ce rapport pendant l’implémentation de l’initiative demanderait une augmentation des apports de N d’environ 75% [3], difficilement réalisable. A défaut, il pourrait y avoir une diminution de la productivité agricole causée par une immobilisation microbienne de l’azote, le rendant ainsi peu disponible aux plantes.
La séquestration du C dans les horizons profonds des sols, via la rhizodéposition de plantes avec un enracinement plus profond, apparait comme un levier d’action possible. En effet, les rapports C:N des horizons profonds sont généralement moins élevés qu’en surface [4]. Cela veut dire que l’apport de C en profondeur ne causera pas nécessairement un déséquilibre stœchiométrique. Le rapport C:N en profondeur est aussi plus variable qu’en surface, suggérant que la contrainte stœchiométrique est moins importante. Un autre avantage de la séquestration du C en profondeur est que le temps de résidence du C est plus long. En effet, à un mètre de profondeur l’âge du C peut dépasser 1000 ans [5]. Cependant, les conséquences d’une augmentation de la rhizodéposition en profondeur sont mal connues (effets sur l’écologie microbienne en profondeur ou sur les cycles biogéochimiques – augmentation des émissions de N2O ou stimulation de la minéralisation des matières organiques du sol déjà présentes) et la stabilité de ce C rhizodéposé n’a pas encore été mesurée. Nos travaux ont montré qu’une séparation spatiale entre décomposeur et substrat de C organique pourrait expliquer les temps de résidence plus longs en profondeur [6]. Nous faisons donc l’hypothèse que des plantes avec une architecture racinaire plus dispersée augmente la séquestration dans les horizons profonds du sol parce que le C rhizodéposé sera moins accessible aux décomposeurs microbiens. Cette thèse s’inscrit dans le projet « Rhizodeposition for sequestering C in deep soil layers - DeepC » pour lequel un financement a été obtenu du CEREEP – ECOTRON ÎleDeFrance.
Objectifs scientifiques
On se propose dans cette thèse de déterminer si la stabilité du C organique rhizodéposé est affectée par l’architecture racinaire des plantes. Les effets des apports de C en profondeur sur les émissions de N2O (un gaz à effet de serre) et sur la stimulation de la minéralisation des matières organiques su sol, un effet appelé « priming effect » (effet d’amorce [6]) seront aussi étudiés.
Méthodologie
1. Démarche
Nous ferons pousser deux variétés de blé (une variété domestiquée et une sauvage), avec des enracinements différents, dans des mésocosmes de sol (80cm de profondeur, diamètre 40cm) dans les Ecolabs du CEREEP – ECOTRON Ile-de-France, sous atmosphère enrichie en 13C, pendant une saison de croissance complète. Le 13C sera incorporé dans les plantes via la photosynthèse et une partie sera rhizodéposée dans le sol, nous permettant ainsi de suivre et de quantifier le flux de C de l’atmosphère vers le sol en fonction de l’enracinement. Etant donné que l’enracinement est très affecté par le régime hygrométrique, deux régimes différents seront comparés (des cycles de dessiccation – réhumectation d’amplitudes différentes). Les mésocosmes seront préparé avec un sol limoneux, typique de la région Ile de France. L’horizon de surface et les horizons en profondeurs seront utilisés. Il y aura 24 mésocosmes au total (2 variétés de blé x 2 régimes hygrométriques x 6 réplications).
A la fin de la saison de croissance les 24 mésocosmes seront divisés en deux groupes de 12. Un premier groupe de 12 sera utilisé pour mesurer la distribution spatiale du 13C et de propriétés microbiologiques. Le deuxième groupe sera incubé pour encore 18mois afin de déterminer la stabilité du C rhizodéposé.
2. Caractérisation et mesures
A la fin de la saison de croissance, 12 mésocosmes seront échantillonnés afin de cartographier la distribution spatiale des racines, du 13C dans le sol ainsi que certaines activités enzymatiques (cellulase, glucosidase). Il est aussi prévu de déterminer le potentiel de production de N20 et de déterminer les quantités de 13C associées à la phase minérale du sol (argiles et limons fins). Pour ce faire, 300 échantillons (cubes de 1cm3) spatialement référencés seront prélevés des 12 mésocosmes. Une partie de ceux-ci seront utilisés pour mesurer les teneurs en 13C du sol à l’aide d’un analyseur élémentaire couplé à un spectromètre de masse isotopique ainsi que la biomasse racinaire présente. D’autres échantillons seront sélectionnés pour la détermination du potentiel de production de N20 [7],l’association du 13C avec la phase minérale et les analyses enzymatiques par fluorescence [8]. Des cylindres de 100g non perturbés seront également prélevés pour mesurer la production de CO2 et 13-CO2 pendant des incubation de 6mois avec un micro-GC et un GC-c-IRMS afin de déterminer la vitesse de minéralisation du 13C.
Le second groupe de 12 microcosmes sera incubé à l’extérieur, au CEREEP pendant 18 mois (deux saisons de croissance) sous les mêmes variétés de blé. A la fin des 18 mois, des cylindres de 100g non perturbés seront prélevés et incubés au laboratoire pour déterminer la vitesse de minéralisation du 13C comme ci-dessus.
3. Conditions de réalisation
Les incubations permettant la croissance de blé se feront au CEREEP – ECOTRON Ile-de-France à Saint-Pierre-Lès-Nemours. Le.a candidat.e bénéficiera d’un support technique avec une grande expérience en environnements contrôlés sur place. Les mesures analytiques (13C, activités enzymatiques, activités de décomposition, analyse des communautés microbiennes…) se feront au laboratoire IEES-Paris à Jussieu. L’équipe d’accueil à une longue expérience de ce genre d’analyse et possède les moyens matériels nécessaires à la réalisation des expérimentations de la thèse (plateforme de spectrométrie de masse isotopique, laboratoire de biologie moléculaire, enzymologie…).
Type de financement autre que ED 129, précisez si envisageable ou acquis : Financement acquis pour les expérimentations en Ecolabs. Il est envisagé de faire une demande de financement EC2CO pour financer une partie des analyses au laboratoire
Pour plus de détails, le descriptif de l’offre est téléchargeable ici.