Contribution de l'AFES à l'enquête sur les disciplines rares engagée par le Ministère de l'Enseignement Supérieur de la Recherche et de l'Innovation

Rédacteurs : Delphine ARAN, Vice-Présidente de l’AFES en charge de l’enseignement supérieur et Michel BROSSARD, ancien Président de l'AFES
Date : Juin 2021

L’Association française pour l’étude du sol (https://www.afes.fr/) est une société savante créée en 1934 qui rassemble toutes les personnes intéressées par les différents aspects de l’étude des sols. Au travers de différentes actions (édition de la revue scientifique Étude et gestion des sols, organisation de colloque, transfert des connaissances, recensement de ressources pédagogiques, soutien aux jeunes chercheurs…), l’AFES a pour but de faciliter les échanges de savoirs autour des sols afin de contribuer à la préservation de ce milieu naturel et cette ressource, fondamentale mais fragile.
A ce titre, l’AFES souhaite contribuer à l’enquête du Ministère de l'Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l'Innovation sur les disciplines rares.
La pédologie s’intéresse aux sols : leurs propriétés minérales, biogéochimiques, biologiques et leur morphologie, leurs origine, fonctionnement et évolution, leur répartition dans les paysages, leur classification !!! De par leur position d’interface entre l’atmosphère, la biosphère, la lithosphère et l’hydrosphère, les sols occupent une position centrale dans les écosystèmes. Ils sont sans doute source de nombreux services (base de notre alimentation, support des infrastructures, réservoir de biodiversité…) mais ils sont vulnérables car devant satisfaire des besoins antagonistes (concurrence terres arables / terres constructibles par exemple) et supporter des exigences anthropiques dépassant leurs capacités effectives.
Leur étude est donc nécessaire et primordiale pour développer leur connaissance, sensibiliser à leurs fragilités et permettre ainsi d’assurer leur protection. Or, la pédologie est une discipline encore mal connue, car relativement récente comparée à d’autres sciences comme les mathématiques par exemple. Elle souffre, de plus, de sa position d’interface, au carrefour d’autres disciplines (biologie, géologie, écologie, physique, chimie, géographie…) et, de ce fait, elle est souvent englobée dans les sciences agronomiques ou les géosciences. Elle a donc, paradoxalement, une faible visibilité alors qu’elle porte sur une composante essentielle de l’environnement. Il semble donc important de mieux valoriser cette discipline en lui apportant une attention propre et en lui reconnaissant les particularités qui sont les siennes. L’érosion de cette discipline dans le cadre ESR vient aussi du fait du « remodelage » du système ES : la mise en place du système LMD a conduit à la perte d’une formation socle qui était développée dans le cadre du DEA national de science du sol. De plus, les créations de postes ESR qui ont souvent été confrontées à des offres très diverses et en concurrence, issues du fonctionnement des UMRs depuis 20 ans, et affectées par les départs à la retraite non compensés depuis une quinzaine d’années, ont accéléré la diminution du tissu national de la discipline. Cela a aussi des répercutions au niveau privé et parapublic dans la mesure où des professionnels « robustes » dans la discipline doivent être issus de formations supérieures pourvoyeuses d’un socle de qualité, dans un contexte où les sols bénéficient d’un retour en grâce auprès des politiques publiques, qui prônent leur utilisation durable.
L’Association française pour l’étude du sol considère que, nonobstant la qualité de la recherche française en science du sol et pédologie, les travaux fondamentaux sur les sols s’amenuisent et le corpus humain de l’ESR de la discipline allant encore fortement diminuer dans les 3-5 prochaines années, nous devons considérer cette discipline comme une discipline rare, qui doit être prise en considération à ce titre.