Auteur : Agnès Gosselin, secrétaire générale afes
Ouvrage collectif quae
Sortir des crises
One Health en pratiques
Hors collection mai 2022
Lien Quae : https://www.quae.com/product/1681/9782759232970/sortir-des-crises
Je veux vous partager ma lecture de l’ouvrage collectif « Sortir des crises, one health en pratiques » sous la direction de l’équipe Sébastien GARDON, inspecteur de santé publique vétérinaire, Amandine GAUTIER,sociologie et politiste, Gwenola LE NAOUR, Maître de Conférence à Sce Po Lyon, Serge MORAND, directeur de recherche au CNRS, associé au Cirad.
Et je voudrais faire cela en premier parce que l’ouvrage donne la parole à des personnes de tous horizons (1). Cela me paraît bien en cohérence avec le thème : en effet, la notion de « One Health » met en avant les interdépendances fortes entre santé humaine, santé animale, et santé des écosystèmes. Ainsi il est primordial d’associer toutes les disciplines et tous les métiers pour croiser les regards.
Chacun s’exprime dans un article-témoignage clair et courageux de 5 à 6 pages sur une des facettes du concept.
Courageux parce qu’au fil des interventions, les problématiques sont posées, les controverses exposées, ce qui permet au lecteur de mieux en mieux cerner le concept de « One Health » ; Le lecteur comprend progressivement que c’est une approche sur le long terme, évolutive, intégrée, inter et même transdisciplinaire, qui fait appel à l’éthique environnementale et aux sciences sociales et à la responsabilité de tous, élus et politiques compris.
Ensuite, j’ai apprécié l’avant -propos de Claire Harpet, anthropologue, université Lyon 3 car il pose bien les conditions d’un nouveau modèle économique pour une société plus résiliente. Pour cela elle s’appuie sur les mythes Malgaches et les règles collectives traditionnelles. Elle nous montre comment cela peut :
– Reconsidérer la place de l’espèce humaine dans l’ordre du monde
– Valoriser les pratiques qui bénéficient à la communauté entière
– Faire le lien entre la crise du Covid et les alertes successives du GIEC sur le dérèglement climatique
– Nous inciter à penser autrement les épidémies, les interactions multipliées intra et
interspécifiques ;
Enfin, j’ai été touchée par la richesse des témoignages et les partages de réalisations concrètes et pragmatiques. Entre autre :
– L’article de Pierre Weill sur l’expérience « Bleu blanc Cœur ».
L’association s’est constituée à la suite d’une étude clinique sur l’introduction de graines de lin dans l’alimentation du bétail et sur la composition en acides gras du sang des consommateurs de produits animaux (2).
Cette association entraîne une démarche de qualité collective qui donne des obligations de
résultats, étudie les liens entre les modes de productions, la composition des produits
végétaux ou animaux, les impacts environnementaux.
L’article de Pierre Weill décrit bien les mécanismes en cause :
o Un apport d’omega 3, un meilleur équilibre oméga3-omega6 dans l’alimentation semble freiner les mécanismes d’entrée du virus dans les cellules et participer à la résolution de l’inflammation.
o Les études de consommation semblent révéler un déficit important d’omega 3 dans le régime des populations les plus touchées par la Covid 19 (3)
– La gestion de la Covid 19 en France : récit « à chaud » sans concession de « Santé publique France » Détecter, comprendre, informer dans un monde incertain et apprendre à vivre avec le virus pour limiter la transmission et changer les comportements
– Le plan National alimentation, en France, une expérience pilote pour la diffusion de « One Health »
– Expérimenter « One Health » pour améliorer la qualité de vie des communautés paysannes au
Cambodge. Une approche intégrée de santé humaine, animale, environnementale est
possible :
o C’est l’objet d’un projet pilote mené au Cambodge avec tous les habitants de 14 villages, par « Vétérinaires sans frontière » de 2016 à 2018.
o Le projet allie prévention, formation et biosécurité et amélioration de la commercialisation dans un appui technique aux petits éleveurs
o Les leviers de réussites sont la concertation entre toutes les parties prenantes de santé publique et environnementale, la formation des éleveurs à la gestion de leur élevage et aux bonnes pratiques d’hygiène, la rencontre d’autres groupes, la sensibilisation aux zoonoses et parasitoses,
o Un soutien financier a été accordé pour un incinérateur et des conteneurs de tri sélectif pour une meilleure gestion des déchets
o Un agent communautaire de santé animale a été nommé pour gérer le dépôt de
médicaments
o Une journée de santé communautaire a été organisée. Elle a rassemblé sachants et
non sachant
En fait, j’ai beaucoup apprécié le ton résolument optimiste des démonstrations : oui, le concept « One Health » peut s’inviter au secours des crises mais il nous impose de changer de lunettes pour observer le monde qui nous environne.
Un seul regret : l’occurrence du mot sol est très faible au long des 256 pages de l’ouvrage.
(1) Médecins, universitaires, vétérinaires, anthropologues, écologues, maître de conférence, consultants, issus des ministères de l’agriculture ou du développement durable, de l’OMS, de l’ANSES des laboratoires, des universités, des instituts de recherche, des ambassades et venant de pays tels que France, Suisse, Québec, Canada, Taïlande, Camboge, Mozambique, Guinée, Brésil.
(2) Article de Weill et all : « Effets de l’introduction de graines de lin dans l’alimentation du bétail sur la
composition en acides gras du sang des consommateurs de produits animaux » in Annales de la nutrition et du
métabolisme, vol.46, n° 5, 2002, pages 182-191
(3) Article de Weill et all : « La supplémentation alimentaire en acides gras oméga-3 peut-elle aider à réduire les
complications graves chez les patients atteints de Covid-19 ? » in Biochimie Volume 179, décembre 2020,
pages 275-280